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Engagement de la responsabilité politique individuelle des ministres

— PROPOSITION SUR LES ARTICLES 20 ET 49 —

Rédacteur(s)

PADOVANI Julien

PEYROUX-SISSOKO Marie-Odile

TOULEMONDE Gilles

Proposition(s)

IX. Le contrôle du Gouvernement et l'évaluation des politiques publiques

74. Responsabilité politique individuelle des membres du Gouvernement

Révision de l’article 49 pour permettre à l’Assemblée nationale la possibilité d’engager la responsabilité politique individuelle d’un ministre.

1. Les dysfonctionnements ou lacunes du droit positif

La rationalisation du parlementarisme à laquelle a procédé la Constitution de la Ve République a conduit à rationaliser les mécanismes d’engagement de la responsabilité politique du Gouvernement, en réduisant la responsabilité politique individuelle des ministres à sa portion congrue (la démission d’un ministre dépend du Président de la République ou du ministre lui-même). Les ministres ne sont pas, à titre individuel, responsables politiquement devant le Parlement. 

Le constat est celui d’une irresponsabilité politique de plus en plus importante de la part des ministres eux-mêmes, dans la mesure où les cessations de fonctions volontaires sont majoritaires (environ 60 % sous la Ve République) quand parmi elles, les motifs politiques sont minoritaires (60 % des ministres démissionnent pour occuper d’autres fonctions). La suspension récente de la jurisprudence Bérégovoy-Balladur imposant à un ministre mis en examen de démissionner renforce cette tendance (affaire Dupond-Moretti).

Parallèlement et par conséquent, la responsabilité individuelle des ministres prend d’autres voies, en particulier celle du juge pénal, ce dont la crise sanitaire témoigne : « les prétoires sont vus comme des forums plus légitimes que le Parlement » (C. Guérin-Bargues). Le juge est de plus en plus amené à contrôler l’opportunité même des décisions politiques, opérant une confusion entre son rôle et celui du politique. Ce glissement de la responsabilité politique vers la responsabilité pénale affecte la logique du régime politique, la séparation des pouvoirs et contribue, in fine, à la crise de la démocratie représentative. 

2. Remède : la proposition

Il s’agit de proposer de restaurer la responsabilité politique individuelle des ministres, par une modification des articles 20 et 49.

Plusieurs scénarios peuvent être envisagés à partir de deux voies d’engagement de la responsabilité ministérielle : la voie parlementaire et la voie populaire. 

  • La voie parlementaire offre deux possibilités : la plus restrictive consiste à dupliquer les conditions actuelles de la motion de censure ; la plus ambitieuse propose de restaurer la procédure de l’interpellation qui constitue un cadre pertinent pour la mise en jeu de la responsabilité individuelle – question des parlementaires, réponse du ministre et débat suivi d’un vote sur le maintien ou non du ministre en fonction. Il a été opté ici pour la première version considérant que la deuxième pourrait engendrer un risque important de surcharge de l’ordre du jour et d’instabilité gouvernementale.
  • En complément éventuel, la voie populaire est celle de l’interpellation populaire. La réunion d’un certain nombre de voix déclenche le processus de mise en jeu de la responsabilité ministérielle, laquelle peut alors prendre deux formes : la première rejoint la voie parlementaire supra ; la deuxième aboutit à un referendum révocatoire. La première voie a été retenue ci-dessous mais en fonction des scénarios envisagés, nous pourrions rédiger la proposition concernant la deuxième (en lien avec les contributions sur le referendum).
  • Enfin, si nous sommes partagés sur la nécessité d’inscrire la possibilité pour le Premier ministre d’opposer à une motion de censure individuelle, l’engagement de la responsabilité collective du Gouvernement, nous en avons toutefois proposé une formulation, car si cela va sans dire, cela va encore mieux en le disant.

3. Les effets escomptés et leur justification Avantages retirés :

  • Améliorer la logique de reddition des comptes au fondement du régime parlementaire en fournissant au Parlement (et au peuple) un outil plus maniable que la motion de censure collective.
  • Renforcer l’autorité et l’implication des ministres dans l’activité gouvernementale et dans la gestion de leur ministère et, partant, renforcer l’autorité du Premier ministre.
  • Renforcer la responsabilité des ministres vers le Parlement et le rôle du Parlement dans le contrôle de l’action du Gouvernement.
  • Diluer le pouvoir du Président de la République, partageant désormais cette prérogative.
  • Améliorer la confiance du peuple dans ses représentants.
  • Dépénaliser le contrôle de l’action gouvernementale.

Inconvénients envisagés : 

  • L’individualisation de la responsabilité politique des ministres n’est pas, en soi, conforme au principe de solidarité gouvernementale au fondement du régime parlementaire. Toutefois, la mesure prévoit qu’à la motion de censure individuelle puisse être répondu l’engagement de la responsabilité collective du gouvernement, décidée par le Premier ministre lui-même.
  • Une forme d’instabilité gouvernementale pourrait en résulter. C’est ici le principal risque dont l’encadrement de la mesure tâche de se prémunir, et que le fait majoritaire conduira à atténuer.

Article 20 al. 3

Alinéas précédents sans modification 

Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50.

Article 20 al. 3

Alinéas précédents sans modification 

Le Gouvernement et les Ministres sont solidairement et individuellement responsables devant le Parlement. Leur responsabilité est mise en cause dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50.

Article 49 al. 2

Alinéa précédent sans modification 

L’Assemblée nationale met en cause la responsabilité du Gouvernement par le vote d’une motion de censure. Une telle motion n’est recevable que si elle est signée par un dixième au moins des membres de l’Assemblée nationale. Le vote ne peut avoir lieu que quarante-huit heures après son dépôt. Seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure qui ne peut être adoptée qu’à la majorité des membres composant l’Assemblée. Sauf dans le cas prévu à l’alinéa ci dessous, un député ne peut être signataire de plus de trois motions de censure au cours d’une même session ordinaire et de plus d’une au cours d’une même session extraordinaire.

Alinéa suivant sans modification

Article 49 al. 2

Alinéa précédent sans modification 

L’Assemblée nationale met en cause la responsabilité du Gouvernement ou d’un ministre par le vote d’une motion de censure. Une telle motion n’est recevable que si elle est signée par un dixième au moins des membres de l’Assemblée nationale. Le vote ne peut avoir lieu que quarante huit heures après son dépôt. Seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure qui ne peut être adoptée qu’à la majorité des membres composant l’Assemblée. Sauf dans le cas prévu à l’alinéa ci-dessous, un député ne peut être signataire de plus de trois motions de censure, pour chaque type de responsabilité, au cours d’une même session ordinaire et de plus d’une au cours d’une même session extraordinaire.

Alinéa suivant sans modification